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6 axes de travail : 6 axes d’impact social
Posté le 10 mai 2023 dans Dossiers

Suite à un travail d’un an en partenariat avec ATIS et Antropia ESSEC, ReSanté-Vous a réalisé sa première mesure d’impact social. Dans ce cadre, nous avons dégagé des entretiens qualitatifs avec nos partenaires 6 axes d’impact social. Ces six axes représentent les impacts sociaux dont les personnes âgées et/ou les professionnels de proximité bénéficient lors de nos actions. Ainsi, nous avons souhaité préciser ce qu’ils représentent pour nous. Ainsi, vous trouverez ci-après un approfondissement de ces axes inscrits dans notre philosophie générale.

Cet article fait suite à un premier écrit présentant la démarche vers l’évaluation de notre impact social. Nous vous invitons à le lire ici ›

Soutenir l’autonomie des personnes âgées…

L’autonomie est un processus interactif d’adaptation reposant sur la capacité à choisir et à gérer sa vie en toute conscience. Fabrice GZIL en propose une définition qui articule l’autonomie morale, fonctionnelle et sociale dans laquelle l’autonomie morale comme la capacité à mener une vie conforme à ses valeurs, l’autonomie fonctionnelle comme la capacité à faire des choix ou à se déplacer et l’autonomie sociale enfin, comme le pouvoir d’agir de la personne dans la cité ou dans un établissement.

Dans cette triple dimension, il semble pertinent voire important de connaître et comprendre d’une part, les valeurs présentes de la personne et de cerner sa compétence ou non à les réaliser dans un environnement donné et d’autre part, sa capacité ou non à les retranscrire elle-même dans ses actes du quotidien. Or, cette capacité ne peut pas être envisagée dans l’absolu, mais toujours en fonction du contexte.

Par exemple, la personne peut savoir manger seule avec un groupe de personnes sur lesquelles elle prend « modèle » et ne pas être capable seule dans sa chambre. Une personne pourra être capable de décider de s’habiller avec un pull rouge le lundi matin et ne plus être capable le mardi parce qu’elle est fatiguée ou elle a mal dormi. Ce contexte rend l’évaluation de l’autonomie complexe et fait appel, par la même occasion à une compétence spécifique. C’est un des enjeux de notre mission, celle d’évaluer les compétences maintenues des personnes dans un contexte donné pour les soutenir et renforcer ainsi leur autonomie.

« Ce que vous faites pour moi si vous le faites sans moi alors vous le faites contre moi… » disait Nelson MANDELA. Comme tout le monde, pour nos enfants ou nos parents âgés, nous avons fait à la place et sans l’autre. Pour un résultat plus rapide ou par bonne intention, « faire à la place » est parfois plus simple. Nous savons aussi que le temps est important notamment pour les professionnels mais « faire », c’est « soutenir » et « soutenir à faire », c’est soutenir l’autonomie. N’est-ce pas l’enjeu de tous les professionnels qui accompagnent les aînés ? Au-delà du consensus de la formule, il s’agit pour nous d’évaluer les compétences des personnes et de proposer des activités adaptées à celles-ci voire de créer les conditions pour que ces compétences s’expriment.

Qui pourrait croire que des personnes vivant en EHPAD seraient capables de prendre la parole lors d’un colloque devant 300 personnes ? Qui penserait que des personnes de 90 ans pourraient se mettre debout sur un stand up paddle ? Qui imaginerait qu’une personne avec des troubles de type Alzheimer exposerait ses œuvres au musée d’histoire de la médecine ? Et pourtant…

Hélène FROGER lors du Colloque ReSanté-Vous 2019

Favoriser la santé par l’épanouissement

Nous ne guérirons personne de la maladie d’Alzheimer, nous ne trouverons pas de pilule magique contre la sarcopénie ni la dépression et nous n’éradiquerons pas l’ensemble des chutes des personnes âgées. En revanche nous cherchons à favoriser la santé par l’engagement dans des activités porteuses de sens et d’épanouissement. S’exprimer par l’art, découvrir un sport jusqu’ici jamais pratiqué, s’essayer au journalisme, devenir chroniqueur radio, re-cultiver son jardin à une période où l’on n’osait plus le faire… voici une liste non exhaustive d’activités pouvant impacter significativement la santé des personnes qui s’y engagent.

La santé résulte d’interactions entre la personne et son milieu et représente donc cette « capacité physique, psychique et sociale des personnes d’agir et d’accomplir les rôles qu’elles entendent assumer d’une manière acceptable pour elles-mêmes et pour les groupes dont elles font partie ». Nous constatons en gérontologie que la perte d’autonomie constitue un obstacle à la diversité de ces interactions.

Notre conception de la culture de la santé repose, non pas sur une vision résolument médicale, mais davantage dans une approche humaniste qui tend à considérer la personne âgée comme un véritable sujet où la dimension de vie supplante celle de survie. Notre démarche consiste à développer une acuité particulière pour identifier les potentialités de chacun pour ensuite proposer des activités porteuses de sens contribuant à raviver un bien être psychologique, social et physique.

Faire évoluer les pratiques « centrées sur la personne »

Plus qu’une technique, l’approche Centrée sur la Personne est une philosophie (une manière d’être) qui s’appuie sur la tendance naturelle de tout être humain à se réaliser en tant que personne. Cette approche, initiée par Carl ROGERS dans les années 40, propose de dépasser une conception médicale de la santé qui tend à considérer la personne âgée comme un véritable sujet où la dimension de vie et d’estime sont fondamentales. De là, certains praticiens et/ou chercheurs, ont imaginé de nouvelles méthodes centrées sur l’humain comme l’Humanitude, la Validation, Carpe Diem ou plus récemment la résilience des âgées de Louis PLOTON ou même la méthode MONTESSORI de Cameron CAMP. Cette dernière est celle qui nous inspire le plus car c’est l’activité qui est au centre pour la personne à la fois l’activité de vie quotidienne (la toilette, la cuisine, le ménage…) ou l’activité de loisirs.

Maria MONTESSORI les appelle les activités de vie pratique. La personne âgée pratique une activité qui a du sens en fonction de son expérience ou de ses envies du moment. Elles permettent à la personne de mobiliser ses aptitudes motrices et psychomotrices soutenant ainsi, son autonomie. Les gestes qu’elle emploiera au quotidien ou dans les activités spécifiques lui permettra de s’adapter au mieux à son environnement. Les activités peuvent être simplifiées notamment si la personne a des troubles cognitifs de type Alzheimer comme transvaser, trier, nettoyer, se laver, ouvrir, fermer, découper et visser. Néanmoins, l’importance est de connecter ses activités à un projet global. Trier pour quoi ? Visser pour quoi ? Si nous séparons ces tâches du projet global, nous ne pourrons pas présenter à la personne la réalisation potentielle et le but de ses actions.

En résumé, l’enjeu pour nos équipes est d’une part, d’identifier l’activité ou les activités porteuses de sens pour la personne et de l’inscrire régulièrement dans celle-ci. D’autre part, il s’agit de transférer, de compagnonner les équipes de proximité pour déployer cet intérêt pour l’activité. En effet, ce sont les équipes présentes au quotidien qui auront le plus d’impact sur le soutien de l’autonomie des personnes.

Faciliter le quotidien

ReSanté-Vous cultive une réflexion éthique et promeut des bonnes pratiques autour d’une réflexion transdisciplinaire. Nous sommes amenés à collaborer avec différentes structures (EHPAD, services d’aide à domicile, collectivités territoriales, pouvoirs publics et acteurs privés) afin de soutenir l’autonomie et favoriser le bien-être des personnes âgées, et en corollaire des personnes qui les accompagnent.

Notre posture professionnelle, qu’elle soit vis-à-vis des personnes âgées, des professionnel.le.s qui les accompagnent ou encore des managers de structures médico-sociales est guidée par la célèbre citation de Maria MONTESSORI « Aide moi à faire seul ». À travers ce principe, notre équipe déploie une méthode d’intervention partant d’observations pour cerner les potentialités de chacun. De proposer ensuite des activités porteuses de sens pour les aînés mais également une montée en compétence des professionnel.le.s.

Formations personnalisées, temps de sensibilisations et compagnonnage dans les actes sont autant de leviers qui nous permettent aujourd’hui de faciliter le quotidien en synergie avec notre philosophie d’accompagnement de terrain. Pour faciliter le quotidien nous accompagnons ces changements par un pilotage suivant l’évolution des objectifs et évaluant l’impact de ces actions.

Rendre l’EHPAD inclusif

L’inclusion pourrait se définir comme un processus complexe de cocréation d’un projet social qui reconnaît les potentialités et la diversité des participations de tous et de chacun, en tant que membres socialement valorisés. Elle ne peut s’opérer sans reconnaissance des ressources matérielles (EHPAD), mais aussi des droits, des pouvoirs et des possibilités de chaque personne. Cette vision globale nous éclaire sur la complexité que représente l’idée d’un écosystème inclusif. L’EHPAD, dans sa mission d’accueil de personnes en situations de handicaps, se veut d’être un établissement avec un soutien humain suffisant et adapté, dans un environnement connecté avec son territoire et ses dispositifs.

D’une part, l’accompagnement humain proposé nécessite une compétence spécifique pour reconnaître la personne et ainsi lui donner accès aux pouvoirs et aux ressources nécessaires, pour que sa voix soit entendue et prise en compte. Cette inclusion réaffirme le droit à la participation sociale pour empêcher qu’elle ne soit isolée. Il s’agit ainsi de faire vivre la démocratie interne pour que les habitants vivent ensemble. L’environnement matériel et humain de l’EHPAD doit dans ce sens, être régulièrement réinterrogé pour viser l’inclusion. L’EHPAD inclusif est, par conséquent, un effort démocratique pour que tous les habitants, aidants et professionnels puissent participer pleinement à sa vie sociale à la fois dans les instances comme le CVS mais aussi dans les activités du quotidien. Comment rendre les habitants acteurs quand leur autonomie ne semble pas le permettre ?

D’autre part, l’inclusion cherche prioritairement à transformer la société. Elle vise à lever les obstacles à l’accessibilité pour tous aux structures ordinaires de santé, de culture, de sport et de loisirs, etc. L’EHPAD inclusif sera connecté à son écosystème et par conséquent, ouvert sur sa cité ou son village. Les habitants participeront à un atelier culturel à la médiathèque avec les enfants de l’école et, dans le même temps, ils recevront aussi les ouvriers du village au restaurant le midi. Comment créer cette connexion quand les habitants ont des troubles cognitifs et sont en fauteuil roulant ? Comment un projet en EHPAD peut fédérer les aidants, le personnel et les habitants alors qu’ils sont tous très différents ? C’est l’enjeu de l’EHPAD inclusif pour ReSanté-Vous.

Enregistrement d’une émission de radio à l’EHPAD Les Jardins de Leysotte (33)

Changer de regard

« L’ennui, la solitude, la maladie » sont les 3 mots qui représentent le plus la retraite pour les français (Rapport CREDOC 2015). Comme l’expose le psychologue Stéphane ADAM, « dans les sociétés de consommation européennes et anglo-saxonnes, devenir vieux est dévalorisé. Il faut être beau, jeune et actif. On le sait peu mais l’âge est devenu un facteur de discrimination plus important que le sexe, la religion ou l’origine ethnique. À tel point que l’on parle d’“âgisme”, un terme qui désigne toutes les formes de ségrégation, de dépréciation ou de mépris fondées sur l’âge ».

Il nous semble important d’agir contre cette stigmatisation soulignée par le coronavirus mais bien antérieure à l’épidémie. Des voix se sont élevées récemment, celles de la comédienne Macha MÉRIL, du chanteur Hugues AUFRAY, du sociologue Michel BILLÉ ou de la journaliste Laure ADLER, lesquelles tentent de modifier le regard que la société porte sur l’âge avancé de la vie. À notre échelle, nous cultivons un regard plein de confiance sur la potentialité des vieux visant à oser réenchanter la vieillesse. Pour renforcer ce changement de regard, nous montons des projets visant à partager la faim de vie des vieux en les décloisonnant d’un carcan sécuritaire et leur offrir le droit au risque de vivre de nouvelles aventures humaines.

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