Les bienfaits de l’activité physique sur notre santé cérébrale : renforcement musculaire ou entraînement aérobie ?
Posté le 31 mars 2014 dans Articles

Il existe de nos jours, de nombreux arguments en faveur de la pratique régulière de l’activité physique sur notre santé. L’activité physique semble-t-il, est un bon moyen de réduire ses risques de développer des maladies de type cardiovasculaire mais également de développer des démences. Notre santé cérébrale semble tout aussi sensible à l’entraînement physique que notre santé cardiovasculaire. Au cours du processus de senescence, de nombreux travaux scientifiques ont donc montré que le déclin cognitif au cours du vieillissement était modéré par l’activité physique (voir newsletter de janvier : http://www.resantevous.fr/dangers-de-linactivite-physique-sur-le-fonctionnement-cerebral-pendant-le-vieillissement/). Suite à ce constat, de nombreuses questions se sont posées quant à la nature des activités physiques à promouvoir et à pratiquer.

Tout naturellement, de nombreux scientifiques ont avancés l’idée selon laquelle l’entraînement aérobie était probablement le meilleur entraînement pour notre santé cardiovasculaire et cérébrale. En effet, il est connu depuis de nombreuses années que l’entraînement aérobie est bien plus efficace sur notre santé cardiovasculaire qu’un entraînement en renforcement musculaire. Mais qu’est-il sur notre cerveau ?

En 2006, Etnier et collaborateurs, furent les premiers à jeter un « pavet dans la marre » en réalisant une méta-analyse, qui compile de nombreux articles scientifiques (37 études, soit 1307 participants) sur le sujet. Les résultats de cette étude montrèrent une association positive entre l’activité physique et la cognition. Néanmoins, l’amélioration de la cognition après un entraînement n’était associée à l’amélioration de la santé cardiovasculaire des sujets, telle que mesurées par la consommation maximale d’oxygène (VO2max). Suite à ce constat, Smiley et collaborateurs, mirent en place une étude sur 57 sujets  d’âge moyen de 70 ans.  28 d’entre eux ont été orientés vers le groupe aérobie (A) alors que les 29 autres ont été inclus dans ce groupe musculation (M). Les sujets devaient participer à un programme d’entraînement physique d’une durée de 10 mois à raison de 3 séances de 60 minutes par semaine. Les participants du groupe A devaient compléter 25 à 30 minutes d’exercices aérobies sur un appareil de leur choix (tapis roulant, appareils elliptiques, ergocycles, rameur, etc.). L’entraînement était continu et l’intensité était prescrite en fonction de la fréquence cardiaque de réserve et d’une échelle de perception de l’effort (13 à 15/20). Quant au groupe M, ces sujets étaient invités à participer à des exercices de Tai Chi et de musculation en utilisant des élastiques résistants et des poids libres. Le programme consistait à réaliser 8 à 10 exercices de 10 à 15 répétitions.

Les résultats démontrent que les deux groupes ont amélioré de façon significative la VO2 max mais que seuls les fonctions exécutives étaient améliorées pour le groupe A. Se pose alors la question pourquoi le groupe B améliore son VO2max mais n’améliore pas sa cognition ?

Plus récemment, dans une étude animale, Cassilhas et collaborateurs, ont démontré qu’après 8 semaines d’entraînement, l’entraînement en renforcement musculaire apportait les mêmes bénéfices sur des processus d’apprentissage et de reconnaissance spatiale que l’entraînement de type aérobie. Les auteurs ont néanmoins montré que les mécanismes neurophysiologiques sous-jacents à l’entraînement, n’étaient pas les mêmes… En ce sens, Claudia Voelker et collaborateurs, ont montré chez 44 participants âgés de 62-79 ans, que les sujets qui se sont entrainés en renforcement musculaire (12 mois), amélioraient leurs fonctions exécutives de la même manière que leurs homologues qui s’entraînaient de manière aérobie. Une seule différence fut toutefois notée, quant à l’amélioration des fonctions exécutives qui étaient différentes en fonction de la nature de l’entraînement. Néanmoins, les bienfais positifs étaient notées dans les deux conditions d’entraînement.

            Finalement, nous retiendrons la conclusion amenée par ces auteurs et celle faite par Angeraven et collaborateurs dans leur méta-analyse,  que peu importe l’activité physique que vous pratiquez, qu’elle soit de nature aérobie ou musculaire, votre santé cérébrale s’en retrouve renforcée.

Les mécanismes neurophysiologiques ne sont probablement pas les mêmes, mais cliniquement les fonctions cognitives sont améliorées. Ainsi, l’activité physique aérobie couplée à du renforcement musculaire est un bienfait important pour votre cerveau et celui de nos aînés. Reste à élucider si l’entraînement combiné force-endurance aura des effets plus marqués qu’un entraînement isolé aérobie ou de renforcement musculaire.

Olivier Dupuy
Maître de Conférences 
Faculté des Sciences du Sport de l’Université de Poitiers Laboratoire MOVE

 
Références

  • Etnier, J. L., P. M. Nowell, D. M. Landers and B. A. Sibley (2006). « A meta-regression to examine the relationship between aerobic fitness and cognitive performance. Brain Res Rev 52(1): 119-130.
  • Smiley-Oyen, A. L., K. A. Lowry, S. J. Francois, M. L. Kohut and P. Ekkekakis (2008). « Exercise, fitness, and neurocognitive function in older adults: the « selective improvement » and « cardiovascular fitness » hypotheses. Ann Behav Med 36(3): 280-291.
  • Voelcker-Rehage C, Godde B, Staudinger UM. Cardiovascular and coordination training differentially improve cognitive performance and neural processing in older adults. Front Hum Neurosci. 2011 Mar 17;5:26. doi: 10.3389/fnhum.2011.00026
  • Cassilhas RC, Lee KS, Fernandes J, Oliveira MG, Tufik S, Meeusen R, de Mello MT. Spatial memory is improved by aerobic and resistance exercise through divergent molecular mechanisms.
  • Neuroscience. 2012 Jan 27;20 2:309-17. doi: 10.1016/j.neuroscience.2011.11.029. Epub 2011 Dec 2.
  • Angevaren M, Aufdemkampe G, Verhaar HJ, Aleman A, Vanhees L. Physical activity and enhanced fitness to improve cognitive function in older people without known cognitive impairment. Cochrane Database Syst Rev 2008:CD005381